Ce sont les dispositions d’ordre public qui régissent le bail (1) pour la location de locaux affectés à un usage professionnel, autre que commercial, industriel, artisanal ou agricole.
Champ d’application
Le régime juridique du bail professionnel s’étendra donc principalement aux baux conclus pour les professions libérales, réglementées (avocats, médecins, architectes…) ou non (consultants…), pour les besoins de leur activité professionnelle.
Cas particuliers : Les baux au profit des établissements d’enseignements sont soumis de plein droit au statut du bail commercial. C’est une exception notable ! Par conséquent, les baux des auto-écoles sont des baux commerciaux.
L’autre exception majeure résulte du choix expresse pour un bail commercial par les deux parties. On considère souvent qu’il est plus protecteur des intérêts du preneur. C’est le cas, notamment, pour le droit au renouvellement que le statut du bail professionnel ne prévoit pas.
Si telle est la volonté, elle devra résulter d’une option expresse et non équivoque. En effet, selon la jurisprudence en vigueur, l’interprétation des clauses d’un bail rédigé par les parties n’implique pas forcément que le bail professionnel soit un bail commercial.
Autrement dit, en cas de contentieux, un bail professionnel établi sur la base d’un modèle de bail commercial se verra appliquer les dispositions du bail professionnel. Et ce, en l’absence de mention disant la volonté des parties de soumettre leur relation contractuelle au statut des baux commerciaux.
Régime juridique
Le statut des bail professionnel est dit « d’ordre public », ce qui signifie que les parties ne peuvent y déroger dès lors que l’objet de leur convention entre dans le champ d’application de ses dispositions, sauf dans les cas expressément prévus par la loi (assujettissement volontaire des parties au statut des baux commerciaux).
Les dispositions contenues dans la loi (1) s’appliquent donc de plein droit à la situation contractuelle. Toute clause contraire doit être réputée non écrite.
Cela étant, ce statut légal relativement limité. Il ne porte que sur la forme du contrat, sa durée, les conditions de sa résiliation, ainsi que sur l’établissement obligatoire d’un état des lieux à l’entrée et à la sortie de chaque locataire.
1) La forme : la nécessité d’un écrit
L’article 57 A de la loi du 23 décembre 1986 précise, dans son alinéa premier, que le bail professionnel s’établit par écrit. En conséquence, la production d’un écrit sera, sauf exception, le seul mode de preuve recevable permettant d’établir l’existence d’un bail professionnel pour la partie qui souhaite s’en prévaloir.
2) La durée
En vertu de la loi, la durée du bail professionnel est impérativement d’une durée au moins égale à six années. Cela signifie que les parties peuvent, d’un commun accord, convenir d’une durée supérieure mais pas inférieure au minimum légal de six ans.
Il convient de préciser qu’il n’existe, en la matière, aucune exception et que la pratique des baux de courte durée ne concerne que les locations qui relèvent de plein droit du statut des baux commerciaux.
Néanmoins, la convention d’occupation précaire permet de déroger au bail professionnel si le bailleur invoque un motif de précarité. Ce peut être le cas, par exemple, dans l’attente d’une expropriation. Dans ce cas, le droit de jouissance du locataire prendra fin, au plus tard, le jour de l’événement sur lequel repose la situation de précarité objective.
A l’échéance du bail professionnel soumis au statut, si aucune des parties n’a notifié sa décision de donner congé dans les formes et délais légaux, le bail est tacitement reconduit pour une durée équivalente à celle prévue au contrat, soit six ans ou plus.
En d’autres termes, la durée convenue entre les parties au jour de la conclusion du bail sera valable pour le contrat lui-même et ses éventuelles reconductions tacites, sans possibilité de prévoir une tacite reconduction pour une durée inférieure à celle du contrat initial.
3) Les modalités de résiliation : un déséquilibre au profit du preneur
En ce qui concerne les modalités de résiliation du contrat, la loi crée une disparité entre la situation du bailleur et celle du preneur.
En effet, alors que le premier ne peut demander la résiliation du bail qu’à son échéance, c’est-à-dire à l’expiration de la durée contractuellement définie qui est nécessairement d’au moins six ans, le second a la faculté de demander, à tout moment, la résiliation anticipée du bail dont il est titulaire sous réserve de respecter un préavis d’au moins six mois.
Si l’une des parties, bailleur ou preneur, souhaite mettre fin au contrat à son échéance, ils devra également respecter ce préavis de six mois. A défaut de notification du congé dans ce délai, le contrat se proroge tacitement pour la même durée.
Afin d’éviter toute contestation relative à la validité du congé délivré par l’une ou l’autre des parties, il sera nécessaire de respecter les formes prescrites par la loi du 23 décembre 1986. A savoir une notification par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par acte d’huissier de justice.
4) L’obligation d’établir un état des lieux d’entrée et de sortie
Enfin, la loi du 23 décembre 1986 impose aux parties à un bail professionnel l’établissement d’un état des lieux au jour de l’entrée en jouissance du preneur et au jour de la restitution des locaux.Il s’agit, ici, de permettre aux parties de déterminer, en comparant état des lieux d’entrée et de sortie, l’étendue des éventuels travaux de réparation ou de remise en état. Pour mémoire, le preneur supportera ces frais au jour de son départ des locaux.
Cette obligation existe depuis la loi Pinel du 18 juin 2014 et vise essentiellement à assurer une protection du locataire. A défaut d’état des lieux, on présumera que le locataire a reçu le local en bon état de réparations locatives. En conséquence, s’il ne peut prouver l’existence de dégradations antérieures à son entrée en jouissance, le bailleur pourra le tenir responsable de toutes les réparations pouvant s’avérer nécessaires au jour de sa sortie.
Nous préconisons donc aux parties et, plus particulièrement au preneur, de procéder à l’établissement contradictoire d’un état des lieux d’entrée, soit à l’amiable, soit par un huissier de justice. Cela est de l’initiative de la partie la plus diligente et les frais seront, dans ce cas, partagés pour moitié entre le bailleur et le locataire.
Le point de vue du juriste
Au-delà des quelques règles posées par la loi du 23 décembre 1986, le droit commun du bail régit le bail professionnel (3). Le droit commun est essentiellement supplétif, ce qui signifie que les parties ont toute latitude pour y déroger.
Il en résulte que le régime juridique du bail professionnel laisse aux cocontractants une grande liberté pour aménager certains aspects importants de la relation contractuelle. Cela concerne la répartition des travaux et des charges, l’indexation du loyer, les conditions de cession du droit au bail et de sous-location…
D’où l’importance de recourir aux services d’un professionnel du droit avant de procéder à l’établissement puis signature d’un tel bail.
(1) articles 57 A et 57 B de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 – (2) article L. 145-2, 1° du code de commerce – (3) articles 1709 et suivants du code civil
G. COURONNE, juriste Cerfrance Alliance Centre
Bonjour, je suis locataire avec un bail professionnel, l’appartement vient d’être racheté par la société du Grand Paris. Le bail courait jusque 2026. Puis-je prétendre à une indemnité d’éviction/déménagement ou autre ?
Le bailleur (propriétaire) est tenu de verser une indemnité d’éviction dans le cas où il refuse le renouvellement du bail, lors d’une échéance triennale du bail commercial. Il ne semble pas que vous soyez dans ce cas.
Si le bailleur souhaite « récupérer » son bien avant la fin du bail, il s’agirait alors d’un résiliation anticipée. Dans ce cas, une discussion s’impose avec lui pour déterminer les conditions et montants des indemnités. Plusieurs éléments vont alors entrer en compte, la valeur marchande du fonds de commerce, les frais de déménagement, les frais et droits de mutation pour acquérir un fonds de même valeur, …
A ce stade, rapprochez vous de votre expert-comptable qui, avec un juriste, examinera votre bail commercial et déterminera avec précision la marche à suivre.
En savoir plus sur l’indemnité d’éviction, cliquer ici (site officiel .gouv.fr).