Le dépanneur qui refuse de restituer à un transporteur le camion qu’il a dépanné pour obtenir le paiement du solde de sa facture, contestée par son client, n’abuse pas de son droit de rétention.
L’histoire
Un garagiste qui avait dépanné un camion sur une autoroute et sauvé la marchandise transportée avait réclamé près de 12 000 € au propriétaire du véhicule, un transporteur. Celui-ci avait réglé 5 800 € et contesté le solde mais, le dépanneur ayant refusé de restituer le camion, il avait fini par payer quatre mois après.
L’affaire portée en justice
Une cour d’appel avait condamné le dépanneur à verser 5 000 € de dommages-intérêts au transporteur, estimant qu’il avait commis un abus dans l’exercice de son droit de rétention : il n’avait pas informé le transporteur de son intention d’user de son droit de rétention et s’était borné, en réponse à la lettre de contestation de celui-ci, à affirmer que sa factures était fondée.
Le prétendu droit de rétention dont il se prévalait s’analysait davantage en un moyen de pression destiné à obtenir le paiement immédiat du solde restant dû, d’autant moins acceptable que le déséquilibre dans la relation ponctuelle d’affaire entre les parties, lié au monopole de fait dont jouissent les dépanneurs, aurait dû l’inciter à privilégier la saisine du tribunal compétent à la rétention du véhicule ; le dépanneur ne pouvait pas présumer de la mauvaise foi du transporteur ou de sa qualité de mauvais payeur ; ce dernier avait effectué un paiement partiel spontané et substantiel de la facture contestée.
La cour en avait déduit que le comportement du dépanneur révélait une véritable intention de nuire, la rétention du véhicule d’un transporteur étant en soi de nature à lui causer un grave préjudice.
La Cour de cassation a censuré cette décision, ces motifs étant impropres à établir le caractère abusif du droit de rétention. Le plaignant a été débouté et le dépanneur blanchi de toute accusation.
Référence : Cass. com. 16 juin 2015 n° 13-26.587 (n° 597 F-D), Sté Châlons véhicules toutes pièces c/ Sté STS Erob