La Cour de cassation confirme que les frais d’entreprise ne sont pas soumis à cotisations, mais rappelle que ces sommes doivent pour cela répondre à un certain nombre de conditions.
L’employeur peut être amené à rembourser des dépenses engagées par le salarié ou à mettre à sa disposition des biens ou services, sans qu’il s’agisse pour autant d’un élément de rémunération, d’un avantage en nature ou d’une indemnisation de frais professionnels. Ces sommes, biens ou services attribués, correspondent à la prise en charge de frais relevant de l’activité de l’entreprise et non de frais liés à l’exercice normal de la profession du salarié.
L’exclusion des frais d’entreprise de l’assiette des cotisations est admise par l’administration
Selon l’administration, ces sommes, correspondant à des charges d’exploitation de l’entreprise, peuvent être exclues de l’assiette des cotisations, même en cas d’application d’une déduction forfaitaire spécifique pour frais, contrairement aux sommes versées au salarié en remboursement de frais professionnels, qui sont, dans ce cas, intégrées à cette assiette. Elles doivent pour cela remplir simultanément trois critères : caractère exceptionnel, intérêt de l’entreprise et engagement par le salarié en dehors de l’exercice normal de son activité.
Ces précisions résultent d’une circulaire du 7 janvier 2003 commentant l’arrêté du 20 décembre 2002 (JO 27 p. 21758) qui a fixé de nouvelles règles de déductibilité des frais professionnels et abrogé l’arrêté du 26 mai 1975 (Circ. DSS 7-1-2003 : BOSS 4-03).
L’administration reprenait ainsi à son compte des principes nés de la jurisprudence de la Cour de cassation antérieure à l’arrêté du 20 décembre 2002, admettant que les sommes versées en remboursement, non pas de frais professionnels mais de dépenses avancées par le salarié pour le compte et dans l’intérêt de l’entreprise, soient exclues de l’assiette des cotisations de sécurité sociale même en cas d’application d’un abattement forfaitaire.
La Cour de cassation confirme sa jurisprudence et valide la doctrine administrative
On pouvait s’interroger sur le maintien de cette jurisprudence sous l’empire de l’arrêté du 20 décembre 2002. L’arrêt du 18 juin 2015 la confirme et la complète.
La Cour rappelle ainsi que constituent des frais d’entreprise au sens de l’article L 242-1 du CSS les sommes versées au salarié en remboursement des dépenses, ne découlant pas de son activité, qu’il a exposées à titre exceptionnel et dans l’intérêt de son employeur.
En revanche, elle ne reprend pas les précisions administratives selon lesquelles il faut, en outre, que les dépenses soient justifiées par : l’accomplissement des obligations légales ou conventionnelles de l’entreprise ; la mise en oeuvre de ses techniques de direction, d’organisation ou de gestion ; le développement de sa politique commerciale (Circ. DSS 7-1-2003 : BOSS 4-03).
La circulaire du 7 janvier 2003 précise que sont notamment considérées comme frais d’entreprise les dépenses engagées par le salarié pour l’acquisition de cadeaux offerts à la clientèle, en vue de la promotion de l’entreprise. Saisie en l’espèce à propos de dépenses correspondant à des cadeaux effectués aux principaux partenaires de l’entreprise, la Cour de cassation confirme implicitement cette doctrine.
Les exigences de preuve sont rigoureuses
La circulaire du 7 janvier 2003 prévoit que les factures constituent la justification de telles dépenses (Circ. DSS 7-1-2003 : BOSS 4-03). L’entreprise en cause en avait déduit qu’il suffisait d’apporter ces éléments pour pouvoir exclure les sommes considérées de l’assiette des cotisations.
La Cour de cassation est plus exigeante. Elle affirme qu’il incombe néanmoins au cotisant de rapporter la preuve que les dépenses ont été exposées dans l’intérêt de l’entreprise et en dehors de l’exercice normal de l’activité du salarié. Autrement dit, il ne suffit pas de rapporter la preuve de la réalité des dépenses. L’employeur doit également pouvoir démontrer que les circonstances de fait sont réunies pour établir qu’il s’agit bien de frais d’entreprise.
Plus précisément, en l’espèce, la société s’était bornée à produire des factures qui ne permettaient pas de vérifier, en l’absence d’indication de l’identité des bénéficiaires des achats, que les dépenses correspondantes avaient été effectuées dans l’intérêt de l’entreprise et en dehors de l’exercice normal de l’activité du salarié. La Cour de cassation confirme en conséquence la décision des juges du fond validant le redressement opéré par l’Urssaf au titre de ces dépenses.
Référence : Cass. 2e civ. 18-6-2015 n° 14-18.592