Droit/Contrats Employeur/Salariés

La faute grave d’un salarié n’est pas une faute lourde

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Il ne peut pas y avoir de mise en jeu possible de la responsabilité pécuniaire du salarié en dehors d’une faute lourde.

Par plusieurs arrêts rendus le 25 janvier 2017, la Cour de cassation a été conduite à réaffirmer le principe selon lequel « la responsabilité pécuniaire d’un salarié à l’égard de son employeur ne peut résulter que de sa faute lourde ».

Ce principe est parfois oublié par les juges du fond qui, dans les affaires en question, avaient condamné des salariés à verser des dommages-intérêts à leur employeur, en raison d’une « exécution déloyale du contrat de travail », sans même avoir caractérisé la faute lourde et donc l’intention de nuire.

Rappel

Pour engager la responsabilité pécuniaire d’un salarié, l’employeur ne peut se contenter de faire état d’un préjudice subi par l’entreprise. Il doit, en effet, démontrer que les faits à l’origine de ce dommage sont constitutifs d’une faute lourde, c’est-à-dire que le salarié les a commis avec la volonde nuire à l’entreprise. Ce qui est très différent de la faute grave.

Ce régime dérogatoire protecteur résulte d’une jurisprudence constante de la Cour de cassation, qui est régulièrement rappelée aux employeurs, mais également aux juges du fond (v. Cass. soc., 25 octobre 2005, n° 03-46.624; Cass. soc., 13 février 2013, n° 1123.920).

Le 25 janvier 2017, la Cour de cassation a adressé une nouvelle piqûre de rappel, en annulant des arrêts de cour d’appel ayant condamné des salariés, en dehors de toute faute lourde, à verser des dommages-intérêts à l’employeur sur le fondement d’une exécution déloyale du contrat de travail.

Salarié licencié pour faute grave

L’une des deux affaires (n° 1426.071 PB) concerne un chauffeur poids lourds licencié pour faute grave pour avoir continué à exercer pendant un mois alors que son permis de conduire n’était plus valable (faute d’avoir renouvelé son certificat médical d’aptitude exigé par l’article R. 221-11 du Code de la route).

La Cour d’appel de Lyon a jugé que le licenciement était fondé et elle a également condamné le salarié à verser à l’employeur 2500 € de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail : le salarié a « exposé délibérément l’employeur aux conséquences gravissimes de la conduite dun véhicule poids lourd de l’entreprise par un conducteur  dépourvu dun permis de conduire valable« .

Cette condamnation à dommages intérêts a pourtant été annulée par la Cour de cassation.

Responsabilité pécuniaire subordonnée à l’existence d’une faute lourde

La Haute juridiction rappelle le principe : « la responsabilité pécuniaire du salarié à l’égard de l’employeur ne peut résulter que de sa faute lourde« .

Aux termes de cet arrêt, aucune condamnation à dommages-intérêts ne pouvait donc être prononcée ici, puisque la faute lourde n’était pas caractérisée.

En effet, la Haute juridiction relève que le licenciement avait été prononcé pour faute grave et non pour faute lourde. Et il n’existait pas « de faits, distincts de ceux visés dans la lettre de licenciement [pour faute grave], susceptibles de caractériser une faute lourde« .

Les employeurs aussi bien que les juridictions du fond doivent ainsi tenir pour acquis que pour engager ou retenir la responsabilité pécuniaire du salarié, il ne suffit pas que ce dernier ait causé, par son comportement, un préjudice à l’entreprise, aussi grave soit-il. Le passage obligé par la faute lourde, impose d’établir que le salarié a agi sciemment dans le but de nuire à l’entreprise. Comme l’a précisé récemment la Haute juridiction, cette intention de nuire à l’employeur « implique la volonté du salarié de lui porter préjudice [en commettant un acte] fautif » (Cass. soc., 22 octobre 2015, 14-11.291, 14-11.801).

Cette exigence permet de réserver à des cas exceptionnels la mise en jeu de la responsabilité pécuniaire du salarié.

D’après Liaisons sociales, quotidien, 3 février 2017

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